Bilan 2014 à 2017
2014
Depuis Avril 2014 le bout de prairie sauvage, peuplée d'herbacées, accueille maintenant notre jardin partagé.
Avant que l'aventure Tout Y Pousse ne commence, le jardin était un bout de prairie que la mairie nous a gracieusement mis à disposition. Une jolie prairie où s'épanouissaient fleurs et plantes sauvages... mais malheureusement peu adaptée à la culture potagère : aucun arbre, arbuste ni haie pour la protéger du vent et du soleil. La seule source d'eau disponible est un puits situé à plus de 100m, vite asséché quand les étés sont secs.
Un véritable défi nous attendait. Mais un défi a cet attrait, celui d'être relevé. Qu'aurions nous appris si tout avait été prêt, disponible et que la seule préoccupation fut celle de nous attacher à cultiver nos légumes ? Peu de choses au regard de tout ce que nous avons appris et réalisé pendant ces 3 ans d'activités... et tout ce qui nous reste à apprendre et faire dans les années à venir !
Les buttes
Cette technique efficace issue de la permaculture nous est apparue comme la solution la plus adaptée pour cette première année. C'est ainsi que 2 buttes commencées en mai, terminées fin juin pour l'une et en octobre pour l'autre, nous ont permis de cultiver nos premiers légumes. ( construction des buttes).
Cultures "sauvages"
En marge des buttes, quelques cultures "sauvages" nous ont apportées un complément, mais rien de probant.
La cabane
Comme le terrain ne comportait aucune bâtisse, il était impératif de disposer d'un endroit pour entreposer le matériel et installer un système de récupération d'eau de pluie. En 2014 nous avions trimbalé les outils et les bidons d'eau en toute saison, il était impensable de subir les mêmes contraintes chaque année.
Acheter une cabane de jardin n'était pas dans nos moyens et ne correspondait pas à nos principes. Nous préférions la récupération et le "fait maison". Nous avons donc récupéré des palettes, liteaux, voliges, tôles ondulées pour la toiture et une vieille porte. Tous ces matériaux réunis, nous nous sommes lancés dans la construction de notre cabane. Dans un premier temps, une unique cuve de 1000L fut installée. Mais lors de la canicule de 2015, celle-ci fut vite vidée. Aujourd'hui deux cuves couplées nous permettent de répondre aux besoins d'arrosage, de plus en plus espacés grâce à un sol vivant, aéré et une couverture adaptée.
2015
Si notre première approche par la mise en place des buttes était satisfaisante et nous permettait d'appliquer certains principes de la permaculture (auto-fertilisation, le non labour…), nous n'envisagions pas d'utiliser uniquement cette technique. Le défi que nous nous proposions était de copier le cycle naturel d'une forêt (un exemple parmi tant d'autres sur internet voir la vidéo). Mais sans arbre comment mettre en place un tel processus ?
Pour ce faire nous avons sollicité les habitants de Trézioux pour qu'ils nous déposent leurs déchets végétaux exempts de produits phytosanitaires : feuillages, branchages, paille, foin, tontes… Pour compléter, nous récupérons à la fin de chaque automne des feuilles et fougères ramassées dans les forêts alentours. Ainsi, un stock de matière organique carbonée (le plus souvent) est stockée dans une partie du jardin et disponible en fonction des besoins.
Ainsi à l'automne 2015 nous avons préparé 2 parcelles. Après avoir dérogé au principe de non labour par un bêchage et désherbage afin de supprimer les adventices et décompacter le sol, les parcelles ont été recouvertes de feuilles, foin, paille et de BRF (Bois Raméal Fragmenté = copeaux issus du broyage des rameaux des branches) provenant des restes de la construction des buttes.
Ces parcelles, durant la saison 2015, sont restées en l'état, nous les cultiverons en 2016 même si le temps nécessaire pour rendre un sol vivant demande au minimum 3 ans.
2016
Pour la saison 2016, les 2 parcelles préparées à l'automne 2015 présentaient déjà un sol amélioré. La couverture avait rempli son rôle protecteur et la dégradation de la matière organique commençait à teinter la surface d'une fine pellicule plus sombre, signe que l'humus prenait place. Les vers de terre visibles à la surface signalaient que la vie s'installait peu à peu. Dans cette terre non foulée, nul besoin de s'éreinter à bêcher, seules quelques adventices furent enlevées pour ensuite délimiter les planches de cultures et placer les différents tuteurs pour les tomates.
Ces dernières furent maladroitement associées aux pommes de terre, sans conséquence, ouf ! En effet, la totalité des sites, revues, livres consultés sur le sujet sont unanimes sur la mauvaise association de ces deux légumes ! Des divergences existent néanmoins sur la pertinence d'autres associations, ce qui n'aide pas les novices que nous sommes !
La tonte de gazon fraîchement coupée a protégé les cultures des pommes de terre et de salades, apporté un peu d'azote, maintenu un peu d'humidité et espacé l'arrosage. Sur les plants de choux et de salades plus évolués, de la paille permettait elle aussi de maintenir plus longtemps le sol frais et humide.
Les TAP
Parallèlement à notre activité, des sessions de Temps d'Activité Périscolaires (TAP) débutèrent en mai. Au jardin partagé, les enfants de l'école de Trézioux apprennent à cultiver au naturel. Les avantages de ces TAP sont nombreux :
- offrir aux enfants un espace-temps ludique et convivial, au grand air et au plus près de la Nature, dans le cadre associatif (valeurs de partage, de coopération, de communication respectueuse,...) avec d'autres adultes référents;
- leur proposer des pistes de réflexion sur ce qu'ils font et observent au jardin, dans un souci de plaisir, de découverte et d'éducation à l'écocitoyenneté;
- leur permettre d'expérimenter sur le moyen terme (10 semaines par cycle) l'approche de la culture des fruits et légumes, les besoins de chaque plante et les qualités du jardinier (patience, expérimentation, persévérance, humilité,...); C'est aussi la prolongation de ce qu'ils peuvent étudier à l'école (la germination, les besoins en eau et lumière des plantes, la protection de l'environnement,....) par l'expérimentation et l'initiation à la démarche scientifique (hypothèse, action, observation, évaluation, réajustement).
- Le jardin partagé leur est bien entendu accessible en dehors des TAP, avec leur famille, dans le respect des lieux et du matériel, afin de montrer ce qu'ils font, de poursuivre les soins s'ils le souhaitent et/ou d'apporter des "ressources" (planches, piquets, grillage, tonte, compost, fumier, plants, graines,...) et ainsi poursuivre leur implication au delà des TAP.
A terme, le but est d'offrir aux enfants un espace pour développer et gérer leur jardin en autonomie. Pour commencer, six petites parcelles leur ont permis de mettre en place leurs premières cultures.
Nouvelles parcelles
A l'automne 3 nouvelles parcelles sont aménagées. Sur l'une d'elles, des palettes non utilisées pour la cabane sont installées. Cela permet une protection contre le vent, le froid et un apport d'ombre pour les légumes sensibles aux fortes chaleurs estivales. Couverte d'adventices et de quelques ronces, un bêchage et désherbage ont été nécessaires. Puis un épais manteau de feuilles, foin, fougères plaqués au sol par un grillage à poule, a été déposé.
Pour la deuxième parcelle, il fut décidé de laissé la végétation en place, de la recouvrir d'une épaisse couche de paille. Ainsi sans lumière, les plantes se décomposeraient laissant place nette. 2 ans de jachères nous paraissait un minimum, repoussant les premières cultures pour 2018.
Pour la troisième un carré de culture (ici rectangulaire) a été installé pour y accueillir des stolons de fraisiers présents en surnombre sur les buttes.
2017
Cette année nous nous sommes reposés sur l'existant, si ce n'est l'investissement dans une serre qui nous permet dorénavant de faire nos semis sur place et non chez-nous.
Les aménagements importants ont été faits dans le cadre des TAP. Peu à peu le jardin des enfants prend forme.
Tout d'abord une magnifique spirale d'aromatiques trône dans un coin de leur petit jardin. Sous la conduite d'un animateur du Parc régional du Livradois-Forez, les enfants de l'école de Trézioux ont bâti cet ouvrage orné de « maisons à insectes". Des petits panneaux, réalisés par un parent d'élève, présentent différents insectes peuplant le jardin. Les enfants pourront ainsi apprendre à reconnaître quelques insectes croisés lors de leur présence au jardin.
Un arbuste était destiné à mourir près du cimetière pour des besoins d'aménagements du centre bourg. Avec l'accord de la municipalité, nous l'avons récupéré et planté près de la spirale. Enfin un mini arbre au jardin, le premier !
Dernière réalisation des enfants lors des TAP : une butte de culture pour le printemps 2018.
Alors après 3 ans et demi quel bilan ?
Voila, nous sommes fin 2017. Il est temps pour nous de faire un petit tour de jardin. Parcourir ces 3 ans et demi d'activités et d'établir un premier bilan.
Les buttes
Leurs mises en place ne fut pas de tout repos, malgré l'aide salvatrice de Paul et de son tractopelle ! 2 buttes de 12M de long sur 1M70 de large ont demandé un travail considérable. Sans parler de la récupération des matériaux et matières nécessaires à leur construction. Si nous devions en refaire d'autres, nul doute qu'elles ne seraient pas si imposantes et ne comprendraient pas tant d'éléments. Le bois mort et les branchages verts enfouis ne nous paraissent plus nécessaires, voir inutiles. Je suis de l'avis de certains permaculteurs qui pensent que les matières organiques doivent être déposées à la surface.
Néanmoins cette technique a ses avantages, et non des moindres : auto-fertilisation, pas de bêchage annuel, arrosage restreint, ergonomie préservant le dos du jardinier, surface cultivable et rendement majoré, structuration esthétique du jardin.
Le seul petit inconvénient, s'il en est, est de supprimer les herbes non désirées... surtout si comme nous, l'on couvre sa butte la première année avec du foin contenant des graminées. Mais au bout de trois ans seules quelques-unes font leur apparition.
Les parcelles
Pour réaliser les parcelles, excepté la dernière, le bêchage et le désherbage ont été nécessaires : trop d'herbes indésirables telles les adventices, les vivaces (le liseron des champs par exemple) et les ronces. Aujourd'hui, plus de bêchage; un simple passage de la grelinette principalement dans les allées et aux endroits où les herbes repoussent suffit.
Seules les ronces demandent une attention et action plus soutenues pour les éradiquer quand elles pointent sur une parcelle. Pour autant, il n'est pas question de les supprimer quand elles se trouvent en bordure : selon les principes de la permaculture on se doit de « travailler avec la nature et non contre elle », et de retenir que « le problème est la solution »... Ainsi pour les ronces en bordure des parcelles, nous nous contentons de les tailler, canaliser, tresser, pour former une haie. Celle-ci sert alors de puits de chaleur l'hiver et de puits de fraîcheur l'été. Elle sert de "couveuse" aux arbustes, arbres et autres végétaux… Elle offre un habitat protégé aux divers insectes et autres petits animaux et favorise la biodiversité.
Pour recouvrer un sol vivant, il faut au minimum 3 ans de "soins" : paillage et jachère,... Au bout de 2 ans, sur la plus ancienne parcelle, le sol s'éloigne de l'état sablonneux initial. Sous la couverture végétale permanente, une très fine couche humifère prend possession des lieux, aidée en cela par une faune et une flore (vers de terre, mycélium,...) travailleuses à souhait. Semer ou planter dans cette terre légère et souple demande peu d'efforts. Quant à l'arrosage en 2017, en dehors des semis, nul besoin, les pluies survenant souvent aux bons moments pour les cultures.
Ces observations, nous les retrouvons sur l'ensemble des parcelles, même sur les plus récentes à des degrés d'évolution moindre toutefois. Laissons leur le temps nécessaire...
Tout, cependant n'est pas encore parfait, loin de là. Ainsi le rendement des cultures sur ces 3 années a manqué de constance. De même, la densité des cultures reste à améliorer : trop de surfaces inoccupées ou clairsemées.
De réelles difficultés à cultiver les légumes racines (carottes, radis, navets…). Ces déficiences s'expliquant peut être par un investissement (en temps et énergie) trop important sur la création des parcelles et d'un sol vivant, au détriment de l'attention et des soins portées à ces cultures.
Dans tous les cas, il est certain que le manque de disponibilité de chacun-e constitue l'inconvénient majeur à l'entretien de ce grand et beau jardin. Heureusement, à l'instar des sportifs, les jardiniers aussi peuvent déclarer : " Nous essayerons de faire mieux la prochaine fois !".
Bonjour ! Moi c'est Gaëlle, jardinière de TYP depuis les débuts
Je partage tout à fait le bilan de Philippe que vous venez de lire. Je tenais simplement à souligner un aspect qui est passé un peu "à la trappe", peut-être parce qu'il ne concerne pas directement les plantes et les cultures évoquées.
Je veux parler de la convivialité au jardin, du bon temps qu'on y passe, avec les enfants du TAP et entre jardiniers. Le ramassage des pommes de terre, la construction de la cabane, le montage de la serre, la récolte des haricots et des tomates, les semis sur buttes,... tout est prétexte à retrouvailles et goûters partagés qui ravissent la gourmande que je suis ;)
Parfois, c'est vrai, on voudrait avoir plus de temps à consacrer au jardin, on voudrait que les carottes poussent mieux et que les ronces ralentissent leur croissance, on râle parce que les tomates ont le "cul noir" et que les glycines plantées ont disparu.
Mais quelle satisfaction devant la salade de tomates dégustées en famille ou entre amis, les haricots qui accompagnent si bien les pommes de terre, les potirons conservés tout l'hiver pour de délicieuses soupes, l'ail qui embaume les plats et prend soin de notre santé. Satisfaction simple d'avoir, par son travail et sa patience, réussi à cultiver ces bons et sains légumes, à moindre coût, dans la convivialité et le respect de Dame Nature, si bienveillante envers nous, humains, pour peu qu'on en prenne soin et partage avec elle ce petit lopin de terre !
C'est aussi cela, vivre l'aventure Tout Y Pousse au jardin partagé de Trézioux !